de regreso a la portada
Editorial Contacto Editorial Contacto
 

 

Investigación  

Cultures et technologies en langues étrangères

Lucía Tomasini Bassols
Guillermo Martínez Atilano

 

La mondialisation et la complexité des échanges d’informations et de communications touchent de nos jours tous les domaines de la vie. Ainsi, les rapports sociaux, économiques, politiques, scientifiques, éducatifs, culturels, et même personnels, se voient modifiés par les profondes transformations inhérentes au développement des nouvelles technologies. Dans ce nouveau contexte d’interrelations, la connaissance de langues étrangères constitue aujourd’hui un enjeu méthodologique, linguistique et culturel sans précédents.

L’enjeu est méthodologique, d’une part, car en relation directe avec les scénarios de la technologie, l’enseignement / apprentissage d’une langue va se voir modifié substantiellement par de nouvelles approches pédagogiques qui vont mettre en valeur divers besoins de l’apprenant, dont celui de construire ses propres apprentissages et qui vont aussi redéfinir le rôle de l’enseignant. Comme une part importante dans la réussite des objectifs, il n’est plus question de laisser de côté la part affective et les éléments socioculturels propres à tous les acteurs intervenant dans le processus enseignement / apprentissage. Au cours de ces échanges, l’élément culturel va être partout présent dans la construction de l’apprentissage.

Il est linguistique, d’autre part, dans la mesure où la langue joue le double rôle d’outil de communication et d’objet d’apprentissage, et que les scénarios de la technologie introduisent des modifications également au niveau des contenus langagiers à enseigner et à apprendre, créant un métalangage qu’il faut assimiler des deux côtés. Par le contact avec d’autres langues, la nouvelle terminologie technique et scientifique enrichit, transforme et peut-être même déforme le champ sémantique, morphologique, syntaxique, phonétique, etc. de la langue-culture cible. Dans le contexte des échanges linguistiques, l’on retrouve l’élément plurilingue comme véhicule dynamique de transformation.

Il est culturel, enfin, car il s’agit d’un enjeu qui, au cours du processus d’enseignement / apprentissage de la langue cible, fait appel à tout un inventaire- complexe, individuel mais aussi collectif- de connaissances, de croyances, d’identités, de valeurs morales, artistiques et sociales, de coutumes et de  traditions, entre autres, dont sont porteurs aussi bien l’apprenant que l’enseignant, et qui va influencer ce processus. Dans le cadre de l’enseignement / apprentissage d’une langue, ce bagage ou inventaire culturel, dont chacun dispose consciemment ou pas, se manifeste notamment par l’attitude envers la langue-culture de l’Autre. Face à cette diversité culturelle à laquelle l’apprenant et l’enseignant  sont exposés, des réflexions autour de la propre langue-culture pour pouvoir assimiler celle de l’Autre, s’imposent à eux. Ainsi le souligne Michaël Byram (1992 :11) « Le processus d’émancipation culturelle inhérent à l’apprentissage des langues est une expérience d’une complexité telle qu’elle ne se résume pas à la grammaire, à la sémantique, aux visites en pays étranger, à la lecture de la littérature étrangère, à l’étude des systèmes politiques d’autres pays, des problèmes sociaux et des événements historiques. Elle comprend toutes ces activités intellectuelles sans se limiter à celles-ci ».

Aussi, l’on peut affirmer que la dimension culturelle, composante fondamentale indissociable de l’enseignement / apprentissage d’une langue étrangère, revêt aujourd’hui, à l’ère de l’internet, de la réalité virtuelle et du multimédia informatisé, une importance toute particulière. Et c’est justement l’incidence de cette dimension culturelle dans les apprentissages qui va me permettre de réfléchir, dans la première partie de ce document, aux échanges interculturels qui s’établissent au cours de la découverte de l’Autre dans le processus d’acquisition de la langue-cible dans un cours de FLE.

Dans la deuxième partie du document, je réfléchirai aux apports des nouvelles technologies multimédias à l’enseignement / apprentissage du FLE et à la portée de la dimension culturelle que ces technologies véhiculent, afin d’identifier les éléments technologiques facilitateurs de l’acquisition de la langue-culture cible. Ayant ainsi cerné l’analyse, je terminerai ma réflexion en essayant de répondre aux questions soulevées, puis en présentant quelques propositions intéressantes sur le plan des pratiques d’enseignement / apprentissage du FLE et la réflexion théorique et méthodologique de la linguistique appliquée au sein de l’Université Autonome Métropolitaine- campus Azcapotzalco (UAM-A, Mexico).

 

La dimension culturelle dans les échanges didactiques

L’enseignement de la culture cible en didactique des langues est une pratique relativement récente, associée à une nouvelle perception de la langue comme vecteur de culture et de la culture comme l’expression d’identités linguistiques, ethniques, géographiques, etc. Autrefois, l’enseignement de la culture française passait, par exemple, par l’étude de textes littéraires considérés représentatifs du pays, ou par des documents – la plupart écrits- qui se proposaient d’inculquer, à travers la langue, des comportements considérés comme un modèle à suivre. Les critères pris en compte dans le choix des textes littéraires, des chansons, des images, ou autres supports didactiques, mettaient en évidence leur caractère stéréotypé, subjectif, répondant à une certaine idéologie et à des besoins ou exigences institutionnels. Par la décontextualisation des thèmes et des personnages présentés étaient véhiculées des dimensions culturelles qui ne correspondaient pas à la réalité du pays, mais à une image faussée que l’on donnait de ce pays. La situation de l’enseignement de la langue était similaire : structures rigides, des registres de langue filtrés, des dialogues cartonnés, une culture enseignée qui servait de prétexte à l’acquisition du linguistique.

De nos jours, envisagée sous d’autres approches issues de l’expérience du  multiculturalisme et du plurilinguisme, la dimension culturelle de l’enseignement / apprentissage prend de l’élan ; elle est plus diversifiée et est introduite dans des supports authentiques, qui n’ont pas été élaborés pour la classe mais dont enseignant et apprenant peuvent se servir à des fins culturelles.

Dans le monde actuel, engagé aujourd’hui dans une course accélérée de globalisation à tout prix et dans tous les domaines de la vie, les finalités de l’apprentissage d’une langue étrangère répondent  -pas uniquement- mais surtout à des besoins d’ordre pratique. Les individus se déplacent plus facilement, dans des délais plus courts, établissent des rapports et échangent des informations de façon instantanée et par des moyens très variés. Ils ont besoin de communiquer ; cette activité porte en soi une dimension culturelle qui relève de la culture-identité propre à chacun des acteurs de la communication. Ainsi parler de la dimension culturelle c’est se demander tout d’abord : qu’est-ce que la culture ?

La culture, en général, peut être définie comme l’ensemble des connaissances acquises, des usages et des coutumes, des manifestations artistiques, religieuses, intellectuelles, idéologiques, des valeurs morales et humaines, qui définissent et distinguent un individu ou un groupe d’individus. Ayant partagé connaissances, valeurs, etc., ces individus ont les mêmes codes de comportement, et c’est ce partage qui leur donne la notion d’identité et le sentiment d’appartenance à un noyau, un groupe, une région, un pays, etc. Robert Galisson (1989 :114) définit l’identité comme étant  « …ce qui permet à l’immense majorité des natifs de se sentir des individus à part entière et d’être reconnus comme tels par tous ceux qui se réclament de la même identité collective ». Ainsi, par exemple, dans un contexte d’enseignement / apprentissage d’une langue, les motivations qui animent un apprenant à entreprendre l’apprentissage de cette langue,  les jugements de valeur qu’il porte sur la langue- cible ou sur la culture-cible, les attitudes qu’il déploie quand il établit le contact avec l’Autre, les stratégies d’apprentissage qu’il développe, tout est imprégné et filtré par sa propre langue-culture, son vécu, ses savoirs, ses savoirs-faire, son contexte d’entourage : en d’autres mots,  par sa façon culturelle d’appréhender le monde. Le point de départ pour acquérir une compétence interculturelle est donc son identité.

D’un autre côté, les méthodes actuelles de FLE, qui se veulent communicatives, accordent une importance très relative à l’enseignement de la culture, la plupart des fois présentée à travers des situations cliché (monter à la Tour Eiffel c’est connaître Paris), des personnages stéréotypés (le Français moustachu), des images préconçues (tous les Français mangent du fromage), des préjugés (les Français n’aiment pas se doucher, dans des textes artificiels ou non authentiques qui peuvent fausser, subjectiviser ou partialiser la réalité culturelle en question. Dans le meilleur des cas, c’est à peine si l’on retrouve dans les manuels et les cours de FLE une mention à d’autres langues-cultures francophones; en général elles n’y sont pas abordées (surtout s’il s’agit des cultures ressortissantes d’anciennes colonies) et le long de son parcours d’apprentissage, l’apprenant voit ainsi limiter, par un choix arbitraire et porteur de stéréotypes culturels dont il devient la proie, ses possibilités d’enrichir ses connaissances sur la langue-culture cible, de la comprendre, d’avoir une vision différente. La possibilité de découvrir cette culture de l’Altérité devient difficile dans la mesure où, pour ces raisons et d’autres – les culturelles à lui-, l’apprenant n’acquiert pas non plus la conscience de sa culturalité. En fait, très souvent, c’est par la découverte de sa culture maternelle qu’il est amené à comprendre les mécanismes d’appartenance à une culture. À ce propos, Maddalena de Carlo (1998 :44) explique que : …plus il aura conscience des critères implicites de classement de sa propre culture, plus il sera capable d’objectiver les principes implicites de division du monde de la culture étrangère  […] et de développer un sentiment de relativité de ses propres certitude, qui  aide l’élève à supporter lambiguïté de situations et de concepts appartenant à une culture différente ». Des réflexions très intéressantes ont été également exposées par des didacticiens tels que Geneviève Zarate, Jean-Claude Beacco, Michaël Byram, Claude Germain, Abdallah-Pretceille, et d’autres, dans lesquelles le dénominateur commun est, en situation d’enseignement / apprentissage d’une langue-culture, la déstigmatisation du recours à la langue et culture maternelles, tant par l’apprenant que par l’enseignant. La comparaison des deux langues-cultures, l’intériorisation des points communs et des différences, constituent quelques unes des étapes par lesquelles l’apprenant est amené à passer au cours de son apprentissage.

La part de l’enseignant est donc bien grande au départ, si l’on considère que l’enseignement /apprentissage d’une langue est directement lié à l’acquisition de la culture correspondante et vice-versa, et que dans le processus d’enseignement de cette langue-culture, l’enseignant doit également tenir compte des acquis cognitifs, affectifs, linguistiques, culturels, que l’apprenant a déjà quand il commence son apprentissage, mais aussi de ceux qu’il est capable de développer s’il est mis en situation de construction de son propre apprentissage.  Dans ce sens, les approches constructivistes, les apprentissages collaboratifs,  les théories sur la rétroalimentation (feed-back) par exemple,  peuvent apporter une aide significative. L’enseignant doit également retenir d’autres critères inhérents à la situation d’apprentissage, comme l’expérience sociale de l’apprenant, ses motivations et ses besoins, son niveau de compétence de la langue cible, tous des critères qui véhiculent une dimension culturelle. Comme le souligne Michaël Byram (1992 :18) « L’étude de la culture a un rôle certain à jouer dans l’enseignement de la langue dans la mesure où les mots d’une langue étrangère renvoient à des significations à l’intérieur d’une culture donnée, créant ainsi une relation sémantique que l’apprenant doit comprendre ».

Au cours du processus d’enseignement / apprentissage d’une culture étrangère, l’enseignant se retrouve face au problème non seulement de la difficulté des critères à retenir afin de favoriser une attitude interculturelle chez l’apprenant, mais aussi du choix des supports didactiques à utiliser, ce qui le mène à réfléchir à la culture qu’il souhaite enseigner, en considérant son utilité, sa pertinence linguistique, l’intérêt qu’elle soulève auprès de son public, etc.: est-ce la culture cultivée ?, la culture spécialisée ?, la culture quotidienne ? 

Les supports médias – image, son, texte - jouent un rôle prépondérant dans la transmission d’une dimension culturelle. Toutefois, l’on a fréquemment recours au support-image comme l’un des supports didactiques qui véhiculent le mieux une dimension culturelle. Dans le contexte de l’enseignement / apprentissage d’une langue-culture, l’apprentissage ne se résume pas uniquement à l’acquisition d’un code linguistique ; le code sémiotique prend aussi une place privilégiée, et son décodage, interprétation, appréhension, répondent eux aussi à des facteurs culturels. L’image est un signe dont la caractéristique essentielle est la dualité présence/absence  qu’elle porte en soi : «… quelque chose est là, in praesentia, que je perçois (un geste, une couleur, un objet), qui me renseigne sur quelque chose d’absent ou d’imperceptible, d’in absentia. Cette caractéristique élémentaire du signe d’être à la place de quelque chose d’autre, d’être un tenant lieu de, on la retrouve dans toutes sortes de signes, qu’il s’agisse de symboles mathématiques, physiques ou chimiques, de cartes, de dessins ou de diagrammes, d’emblèmes ou de signaux, de symptômes, etc », écrit Martine Joly (1994 :27). Lors du choix d’une image, dans un cours de langue, par exemple, l’enseignant est amené à bien réfléchir sur la dimension culturelle que cette image véhicule, car cela va orienter son décodage par l’apprenant. Un exemple récurrent est le cas de certaines images publicitaires télévisées, qui peuvent susciter un rejet culturel ou une interprétation faussée de la culture cible. À travers l’image, l’apprenant cherche à créer des repères culturels en se basant sur sa propre culture. Il prend conscience de son identité et de son appartenance à un groupe ou une communauté ; il établit des comparaisons, fait des réflexions, s’identifie ou pas au message qu’il vient de décoder. Cela lui permet de réaliser une introspection  d’où il peut tirer des réflexions qui affirment son identité et enrichissent sa connaissance de lui-même, ou qui soulèvent  un rejet de son autoestime, ou alors suscitent l’intérêt envers l’autre. 

Et de même que l’image, d’autres codes –audio, texte- mettent en jeu une dimension culturelle qui renvoie à des croyances, des désirs, des mythes, des fétiches, pouvant faciliter ou pas la compréhension de l’altérité.

La recommandation R (84) 18 du Conseil des ministres aux États membres du Conseil de l’Europe (Cf. 2000 :122) considère que : « l’épanouissement des échanges de tous ordres passe par une meilleure connaissance de la culture et du mode de vie des peuples ainsi que, le cas échéant, de leur patrimoine culturel commun ». Dans ce document, une recommandation concrète est faite aux enseignants : « reconnaître que les attitudes ethnocentriques et les stéréotypes peuvent causer du tort aux individus et donc essayer de contrer leur influence ».

L’échange interculturel est donc non seulement un processus par lequel passe l’apprenant au cours de son apprentissage, mais aussi une introspection de soi-même qui reflète son identité personnelle, l’enrichit et lui permet de mieux comprendre la langue-culture de l’Autre. Cet échange mobilise des critères d’identité sine qua non l’ouverture envers l’Alterité n’est plus possible.

Finalement, comme l’échange peut se vérifier sur n’importe quel support- un blog, un forum, un cours en ligne, au téléphone, etc-, il convient de réfléchir aux médiations technologiques qui le véhiculent.

 

La dimension culturelle et le multimédia en FLE

Avec l’introduction de l’ordinateur dans les pratiques de classe, l’accent a été mis sur les nouvelles modalités d’enseignement / apprentissage multimédiatisé. Ce nouvel outil offre des possibilités inédites, explique Nathalie Hirschsprung (2005.www) : « …ce qui définit le multimédia, au sens large, c’est la coexistence sur un même support des technologies de l’écrit, de l’image et du son, ainsi que le principe fondateur de l’hypertexte, qui présente l’information selon une modalité de lecture non linéaire … ».

Actuellement, le terme multimédia revêt un sens beaucoup plus large qu’auparavant, et plus performant aussi. Il est toutefois pertinent de souligner que l’utilisation de la technologie multimédia dans l’enseignement / apprentissage des langues s’inscrit dans un processus de renouveau pédagogique dont l’évolution date de plusieurs décennies. Dans ce sens, à titre de rappel,  je mentionnerai l’introduction en didactique des langues, de l’audiovisuel -qui réunissait pour la première fois sur un même support trois médias : image (fixe), son, texte, sans pour autant les articuler- et, plus tard, les méthodes télévisées qui s’appuyaient sur ces trois médias dans des dispositifs d’apprentissage plus élaborés. Actuellement, les innovations dans les Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement  (TICE) situent les échanges didactiques de langues étrangères dans une nouvelle perspective, dans laquelle l’utilisation des TICE procure différentes alternatives d’enseignement / apprentissage. Ainsi, le processus d’acquisition et d’enseignement d’une langue étrangère va se voir modifié par les ressources multimédia mises en place afin de véhiculer les informations ; mais il va se voir également modifié par le contexte socioculturel dans lequel il s’insère, c’est-à-dire par la culturalité de l’enseignant, d’une part, celle de l’apprenant, d’autre part, et enfin par les contenus culturels de l’enjeu pédagogique.

Il me semble important de souligner la signification extraordinaire acquise depuis quelques années par la technologie multimédia informatisée dans les contextes de formation. L’appropriation croissante dont  elle fait l’objet auprès des apprenants, des enseignants -en moindre mesure-, des chercheurs de toutes les spécialités, des informaticiens en particulier et du public en général, en témoigne largement. À la place des traditionnels projecteurs de diapositives, des rétroprojecteurs, des magnétophones ou vidéos aux formats hors d’usage ; au lieu du livre, du cahier et du stylo, enseignant et apprenant disposent aujourd’hui d’outils  tels que les multimédias, les ordinateurs, l’internet, le téléphone cellulaire, les réseaux de communication par câble, par satellite ou numérique, etc. pour leur travail. À différence d’hier, où la salle de classe constituait l’espace géographique d’enseignement / apprentissage par excellence, où le professeur assumait un rôle prépondérant et prédominant, et où l’apprenant recevait les apprentissages sans s’impliquer activement dans son processus d’acquisition des connaissances, de nos jours, l’emploi de l’ordinateur et des technologies multimédias informatisées renverse les rapports entre les protagonistes et situe la pratique pédagogique dans une autre dimension. C’est le cas de l’enseignement / apprentissage du FLE aux moyens des TICE.

L’introduction de l’ordinateur et des dispositifs d’apprentissage multimédia a mis en relief quelques-uns des éléments essentiels qui caractérisent les nouvelles technologies : l’interactivité (par le rapport machine/utilisateur établi à travers une ergonomie de plus en plus performante, la possibilité de l’autoévaluation immédiate et rétroalimentée, la motivation déclanchée, l’intérêt pour la découverte de l’autre, entre autres composants) ;  l’interconnexion (qui donne lieu à l’hypertexte et aux hypermédias) ; l’instantanéité (à travers l’internet, l’intranet, les plate-formes,) l’accessibilité (enseignement / apprentissage et connaissances à portée de tous, sans restrictions spatio-temporelles ). Elle a apporté des changements radicaux, à plusieurs niveaux,  au processus d’enseignement / apprentissage. Toutefois, c’est en premier lieu et de façon plus directe l’apprenant, plus que l’enseignant, qui va bénéficier des avantages des technologies de l’information et de la communication appliquées à l’enseignement :

1) D’une part, au niveau des espaces d’acquisition de la langue, dans la mesure où l’enseignement / apprentissage n’est plus restreint à l’espace classe. Les centres de ressources des institutions d’enseignement constituent, dans ce sens, des espaces qui favorisent le développement des enseignements / apprentissages multimédias informatisés, sur internet et intranet,  à distance, ou en systèmes de tutorat à travers des plate-formes comme Moodle, Claroline, et autres. « Pour apprendre en autodirection, il faut disposer des ressources, humaines et matérielles, qui rendent possible un tel apprentissage », propose Henri Holec (1994 :10)

Il est important de souligner ici l’intérêt et importance que suscitent les forums, le tchat, les blogs, etc., car ils constituent des espaces ouverts à la pratique de la langue, à l’échange culturel et à la découverte de soi et de l’altérité. Les barrières spatio-temporelles sont éliminées quand il s’agit d’enseignement / apprentissage à distance ; elle sont diminuées significativement quand il s’agit d’apprentissage en semiautonomie, une modalité d’apprentissage  issue de l’emploi du multimédia, qui permet à l’apprenant d’alterner le présentiel et l’autonomie. La participation de l’enseignant -qui devient un formateur- est particulièrement positive dans un apprentissage en semi autonomie, dans la mesure où il constitue un appui pour l’apprenant qui n’est pas entièrement seul dans le processus d’acquisition de la langue. Dans le cas du FLE, il est important pour l’apprenant de pouvoir compter avec le guidage du formateur pour le développement des compétences communicatives, en particulier de l’habilité de production orale. La composante phonétique de la langue, la dynamique de la communication, et d’autres aspects ne peuvent pas être remplis en entier par le biais des technologies ni en totale autonomie. Le facteur humain et l’échange qui s’en découle, y sont indispensables. 

2) D’autre part, au niveau des stratégies affectives et motivationnelles, dans la mesure où la médiation de l’ordinateur permet à l’enseignant et  à l’apprenant d’objectiver leurs rapports, et peut même rendre possible l’anonymat des interlocuteurs. Du point de vue d’une dimension culturelle, cette situation est positive car elle éloigne les fantômes du préjugé, du stéréotype, de l’a priori, inhérents aux situations de communication. Cette médiation favorise également l’interaction entre les apprenants eux-mêmes (par le tchat, le courrier électronique, les forums, les blogs, etc.) et entre l’apprenant et la culture étrangère. L’incursion dans la culture de l’Autre devient plus facile.

3) Au niveau des stratégies cognitives, dans la mesure où l’apprenant se retrouve dans un cadre de travail individualisé. Sans contraintes de rythme de travail, d’objectifs linguistiques imposés par l’enseignant ou par l’institution et qui ne répondent pas forcément à ses besoins, il est amené à se dresser un parcours d’apprentissage acheminé vers l’autonomisation. Les caractéristiques des ces technologies favorisent le développement de stratégies d’apprentissages constructivistes, de collaboration. Confronté à un rôle beaucoup plus actif, l’apprenant peut se responsabiliser de son apprentissage  et acquérir des compétences fonctionnelles, organisationnelles, métacognitives ; à travers sa propre culturalité, il développe des stratégies d’apprentissage qui reflètent une dimension culturelle. Cette culturalité, comme nous l’avons analysé au début du présent document, peut faciliter ou limiter l’apprentissage / acquisition de la langue-culture cible.

4) Enfin, au niveau de l’enseignant, qui assume un rôle beaucoup plus modéré que dans l’enseignement traditionnel; et devient un médiateur. Il va être en partie déchargé de la responsabilité de l’apprentissage de l’apprenant. S’il est vrai qu’il n’est plus le seul à prendre cette responsabilité, il assume pourtant un rôle irremplaçable dans l’enseignement / apprentissage en semiautonomie.

Ainsi que l’affirme F.Mangenot (2000 :38-44), « La véritable intégration des TICE, c’est quand l’outil informatique est mis avec efficacité au service des apprentissages ». Tout fait croire qu’aujourd’hui, les TICE sont mieux orientées vers les apprentissages.

Néanmoins, l’utilisation –parfois exagérée, souvent irréfléchie- des TICE dans l’apprentissage / acquisition d’une langue ne constitue pas la panacée des apprentissages. La maîtrise, par l’utilisateur, du multimédia informatisé, ou tout au moins la capacité de cet utilisateur à interagir sur un pied d’égalité, fait aussi appel à des savoirs précis qu’il faut forcément acquérir pour la manipulation de la technologie. Lorsqu’ils ne le sont pas, ils peuvent mettre en évidence des sentiments de soumission, de frustration, d’incapacité à réaliser des tâches informatisées de la part d’un apprenant de langue, qui, démotivé, va se décourager dans son apprentissage linguistique-culturel. Dans ce sens, M-J Barbot (2000 :59) signale que « Compte tenu des multiples formes sous lesquelles apparaissent les langues, de la nécessité pour l’apprenant de savoir par lesquelles passer et enfin de la manière de les utiliser pour apprendre, on peut affirmer que les interfaces entre apprenant et ressources ont un rôle stratégique ».

Les supports médias tels que l’image, le son, le texte, -nous l’avons déjà mentionné- véhiculent la culture. Un environnement d’apprentissage multimédia, avec toutes les potentialités d’interconnectivité qu’il offre, peut être la source de l’épanouissement de l’apprentissage / acquisition d’une langue-culture, mais aussi la raison de son rejet linguistique et culturel. Cette dualité est un facteur délicat à ne pas délaisser. Tout comme le suggère J. Cabero (2000 :15), « al final del siglo XX vivimos uno de esos raros intervalos de la historia. Un intervalo caracterizado por la transformación de nuestra cultura material por obra de un nuevo paradigma tecnológico organizado en torno a las tecnologías de la información”.

Cependant, ni les TICE ni les ressources pédagogiques informatisées ne peuvent remplacer l’élément humain –avec sa part de vécu, de mémoire, de savoirs, de culture- dans le processus d’enseignement /apprentissage d’une langue. La dimension culturelle d’un apprentissage est une notion qui revêt une importance décisive dans un cours de langue, car elle mobilise la culture-identité des interlocuteurs ; elle peut être l’élément déclencheur d’une prise de position envers la langue et la culture cibles ; elle touche l’affectif et le cognitif ; elle véhicule une  intention concrète ; elle est présente dans la langue à apprendre, et à travers elle, on établit souvent le premier contact qui reste essentiel.

 

Modalités de mise en pratique des réfléxions présentées

Sur la base des considérations mentionnées tout au long de ce document, et qui sont de l’ordre du pédagogique, linguistique, culturel et technologique essentiellement, des programmes d’apprentissage dans des environnements multimédia (voir Programme interactif pour l’apprentissage de la langue française en semiautonomie. Flores Ociel & Tomasini Lucia :2008) ont été élaborés et d’autres sont en cours d’élaboration à l’UAM-Azcapotzalco (voir Programme de français interactif pour la compréhension de textes en fle. Tomasini Lucia & Cansigno Yvonne :2009). Le Centre de Ressources de Langues Étrangères a aménagé un espace performant, le CAILE 1 , dans le but de les mettre à portée de ses apprenants. Les universitaires y trouvent des documents authentiques, téléchargés du réseau internet, portant sur leurs spécialités ou sur des thèmes d’actualités, qui leur permettent de s’entraîner dans la recherche ou dans leur champ de spécialisation.

Une autre modalité d’apprentissage a été récemment mise en place au  Centre de Langues Étrangères de cette université publique de Mexico. Il s’agit d’un travail collaboratif sur la plate forme Claroline, entre notre université UAM-Azcapotzalco et l’université française Blaise Pascal, consistant à piloter des activités d’apprentissage élaborées par des étudiants français de Master 1-futurs enseignants de FLE, d’après un profil d’étudiant UAM proposé par nous (les responsables de la partie mexicaine du projet).

Ce projet met en place des stratégies d’apprentissage médiatisées par la technologie dans un scénario d’échange interculturel franco-mexicain. Une base de données doit être élaborée à la fin du projet, dont l’analyse me permettra de tirer des conclusions qui peuvent être utiles à l’amélioration du travail pratique et un point de départ pour la réflexion théorique au Centre de Langues Étrangères de l’UAM-Azcapotzalco.

 

Bibliographie

AUSUBEL David et al.
1983   Psicología educativa. Un punto de vista cognoscitivo. 2ª edición. Trillas, México

BARBOT Marie-José
2000   Les auto-apprentissages. CLE International, Paris, France

BEACCO Jean-Claude
2000   Les dimensions culturelles des enseignements de langue,  Hachette, Collection F, 1ere  Edition, Paris, France

BYRAM Michaël
1992   Culture et éducation en langue étrangère, Crédif. Didier. Paris, France

CABERO Julio et al.
2000   Nuevas tecnologías aplicadas a la educación. Didáctica y organización escolar. Síntesis Educación. Madrid, España

CARRIER Jean-Pierre
2000   Escuela y multimedia, Siglo XXI Editores, México

DE CARLO Magdalena
1998   L’interculturel, CLE International

DEFAYS Jean-Marc
2003   Le français langue étrangère et seconde. Enseignement et apprentissage, Editions Mardaga, Belgique

DICKINSON Leslie
1987   Self-instruction in language learning. Cambridge University Press

GERMAIN Claude
1993   Évolution de l’enseignement des langues : 5000 ans d’histoire. Didactique des langues étrangères, CLE International, France

HOLEC Henri
1994   L’apprentissage autodirigé : une autre offre de formation. CRAPEL. Nancy II. France

HERNÁNDEZ Rojas Gerardo
1998   Paradigmas en psicología de la educación, Paidós Educador, México

LANCIEN Thierry
1998   Le multimédia, Didactique des langues étrangères, CLE International, France

MANGENOT F.
2000   L'intégration des TIC dans une perspective systémique. Les Langues Modernes, n° 3. pp. 38-44

MEDINA Liberty Adrian
2002   La dimensión socio-cultural de la enseñanza. La herencia de Vigotsky.  Instituto Latinoamericano de la Comunicación Educativa (ILCE), México

MEIRIEU Philippe
1999   Peut-on enseigner à apprendre ? dans  Repères et Applications en didactique des langues, (Xxes Journées pédagogiques sur l’enseignement du francais en Espagne). Editions de l’Institut de Ciences de l’Educació de l’Universitat Autónoma de Barcelona, España

MEMORIAS DEL CUARTO COLOQUIO DE LENGUAS EXTRANJERAS
2005   División de Ciencias Sociales y Humanidades de la unidad Azcapotzalco. Colección Memorias. Universidad Autónoma Metropolitana. México

STEIGER, Johann Anselm
2003   Die Sehnsucht nach der Nacht. Frühromantik und christlicher Glaube bei Novalis (1772-1801). Manutius, Heidelberg.

UERLINGS, Herber.
1998   Novalis. Reclam, Stuttgart.

 

Références sur Internet

 

Multimédias consultés

  • Programme interactif pour l’apprentissage de la langue française en semiautonomie.
    Auteurs : Ociel Flores Flores et Lucía Tomasini Bassols (2008)
  • Programme interactif de français pour la compréhension de textes.
    Auteurs : Lucía Tomasini Bassols et Yvonne Cansigno Gutiérrez (2009)

* * *

 1  CAILE: Centro de Aprendizaje Interactivo de Lenguas Extranjeras

 

Editorial Contacto