Le projet CECA Mexique: présentation, bilan et perspectives

Haydée Silva

 

 

1. Origine et caractéristiques du projet CECA

Le projet international « Langue française, diversité culturelle et linguistique : cultures d’enseignement, cultures d’apprentissage », mieux connu sous le nom de projet CECA, est né de la collaboration entre l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) et la Fédération Internationale des Professeurs de Français (FIPF), qui ont décidé de le placer sous la tutelle scientifique du Centre de Recherches et d’Applications Pédagogiques en Langues (CRAPEL) de l’Université de Nancy. Une trentaine d’équipes ont répondu à l’appel lancé fin 2006 pour déterminer, au-delà des grands principes didactiques en vogue, quelles sont les modalités locales, collectives et individuelles, d’appropriation de la langue française (qu’il s’agisse de FLE ou de FLS) et quels sont les traits constants de ces modalités, au-delà des représentations et des comportements singuliers. Vingt équipes qui représentent autant de pays ont été ainsi sélectionnées [1] .

Le projet CECA est organisé autour d’un protocole commun élaboré par le CRAPEL, auquel chaque équipe a apporté les ajustements qu’elle a jugé pertinents et nécessaires. Quatre étapes ont été prévues : il s’agissait en premier lieu de recueillir un certain nombre de données ; en second lieu, de les soumettre à une analyse critique afin de rendre une première étude interprétative. En troisième lieu, ces résultats ont commencé à faire l’objet d’un échange entre des équipes issues d’horizons divers. Les premiers résultats du projet ont été présentés à Québec en juillet 2008, dans le cadre du XII Congrès mondial de la FIPF. En 2008-2009, ces études préliminaires devront être retravaillées à la lumière des réactions obtenues et donneront lieu en quatrième et dernier lieu à une seconde analyse beaucoup plus fine.

Le protocole CECA est fondé sur trois principes méthodologiques. D’abord, la notion de « culture » est prise dans un sens large qui intègre l’ensemble des composantes matérielles et immatérielles de la situation d‘enseignement/apprentissage observée. Ensuite, les équipes ont privilégié le recueil de productions, l’observation de pratiques, de comportements et d’outils utilisés, plutôt que les discours officiels sur les pratiques. Il convient de souligner que cette recherche cherche à dresser un état des lieux et n’a donc nulle visée évaluative. Finalement, on part du principe que l’interprétation des pratiques et des comportements doit être le fait de personnes qui connaissent le contexte local et qui disposent de compétences en anthropologie et en didactique.

Dans le protocole, il était conseillé d’inclure trois écoles ou lycées (publics ou privés), différenciés selon divers critères [2] . Il fallait ensuite choisir une classe située en deuxième année d’apprentissage du français. Les données ont été recueillies de diverses manières : par observation directe, par le biais de questionnaires et grâce à des enregistrements. En effet, dans chacune des classes retenues, six séances animées par le même enseignant ont été filmées, même si seules les deux dernières séances ont été analysées en détail.

Pour réaliser aussi bien l’observation de classe que l’analyse des données, les équipes CECA ont suivi un script articulé autour des six thèmes suivants:

1.      Données globales et spécifiques d’enquête.

2.      Langues utilisées à l’école et à l’extérieur de l’école, ainsi que pendant les séances filmées.

3.      Répartition oral/écrit.

4.      Représentations sur le rôle de l’enseignant et le rôle de l’élève.

5.      Étude des manuels.

6.      Pratiques d’apprentissage et pratiques d’enseignement.

La synthèse de ces différents points devait aboutir à une ethnographie de la salle de classe, et donc à une description des cultures d’apprentissage et d’enseignement en vigueur.

2. Bilan du projet CECA Mexique

À ce jour, en septembre 2008, le bilan global du projet CECA est très positif. Tout d’abord, nous restons convaincus de la pertinence du protocole proposé, auquel nous avons apporté certains ajustements pour tenir compte de notre contexte local. Les données recueillies constituent un corpus riche et unique, à partir duquel s’ouvrent de nombreuses pistes de recherche, dont nous allons donner quelques exemples. Ce projet nous a permis de mettre en place un chantier scientifique qui, à court, moyen et long terme, devrait enrichir le domaine du FLE au Mexique et ailleurs dans le monde.

L’équipe CECA Mexique était composée de onze membres, rattachés à six institutions différentes [3] . Bilingue et biculturelle, l’équipe réunit également des chercheurs confirmés, de jeunes chercheurs et une étudiante. Malgré quelques difficultés budgétaires [4] , de communication et d’organisation, nous avons eu le plaisir de constater que le travail de l’équipe mexicaine –recueilli en décembre 2007 dans une synthèse de 85 pages plus trois annexes– a été reconnu par le comité scientifique pour sa qualité et son sérieux [5] .

À notre sens, le projet CECA nous a permis d’aboutir moins à des résultats définitifs qu’à l’identification de nombreuses pistes de recherche, qui restent à creuser. Parmi les principales thématiques à approfondir, nous citerons par exemple la question des langues en présence ; l’écart flagrant entre discours et pratiques ; la relation problématique entre profil des enseignants et cadre professionnel ; les contradictions entre représentations relatives à chacun des acteurs de la scène pédagogique et rôles effectivement observés dans la classe ; ou encore l’exploitation ou plutôt l’absence d’exploitation des manuels.

2.1. Les langues en présence

La question des langues en présence s’avère particulièrement intéressante dans un pays comme le Mexique, qui occupe la 8e place mondiale quant à la diversité culturelle et où une centaine de langues indigènes seraient parlées. Pourtant, l’espagnol –première langue de scolarisation– est considéré comme la langue-culture permettant d’accéder à la réussite sociale, tandis que la langue étrangère la plus souvent enseignée reste très majoritairement l’anglais (90 à 95% selon le niveau d’enseignement). De nombreuses écoles privées et quelques écoles publiques proposent néanmoins à leurs élèves la possibilité d’étudier une deuxième langue étrangère, et le choix se porte le plus souvent sur le français. D’après des données recueillies en 2006 par l’Ambassade de France au Mexique, environ 180 000 jeunes ou adultes –dont 25 000 lycéens­– apprendraient le français, encadrés par 1200 enseignants.

D’après l’enquête que nous avons réalisée, aucun des apprenants observés ne déclare utiliser une langue indigène, malgré la relative diversité des publics concernés par notre projet. Sans oublier de problématiser l’écart entre pratiques déclarées et pratiques réelles, il serait sans doute intéressant de déterminer dans quelle mesure la langue française parvient à toucher les locuteurs de langues indigènes.

Les questionnaires appliqués jettent aussi des résultats significatifs et parfois inattendus par rapport aux langues utilisées (parlées, apprises, côtoyées…) dans les domaines personnel, public et éducationnel. Ce point est développé dans ce même dossier par Béatrice Blin. Pour sa part, Anne-Catherine Didier travaille à partir des enregistrements de classe pour proposer sa réflexion autour de l’alternance codique, c’est-à-dire du passage d’une langue à l’autre en cours de séance. Il conviendra sans doute de mettre en contraste ces études avec celles concernant d’autres réalités socioculturelles à travers le monde.

2.2. L’écart entre discours et pratiques

Une première approximation aux discours officiels et aux contenus des programmes, confrontée aux discours individuels recueillis et aux pratiques observées, met en évidence l’écart flagrant entre hypothèses méthodologiques préconisées, supports utilisés et pratiques de classe effectives.

Dans ce sens, il convient de savoir qu’à l’exception de l’Escuela Nacional Preparatoria, aucun des établissements observés ne disposait d’un programme officiel en FLE. Chacun d’entre eux possède néanmoins un modèle éducatif aux aspirations fort ambitieuses mais parfois floues et surtout relativement méconnues. Malgré une forte présence des nouvelles échelles de certification du DELF, les orientations méthodologiques actuelles, recueillies dans le Cadre européen commun de référence, sont peu présentes au quotidien. De plus, les quatre programmes étudiés présentent de sérieuses inconsistances méthodologiques et devront sans doute faire l’objet d’une étude spécifique, où il faudra mettre en perspective l’absence de textes officiels régissant l’enseignement des langues dans le pays.

2.3. Un cadre professionnel difficile

Les éléments relatifs au profil des quatre enseignantes, à leurs conditions de travail et à l’éclatement des équipes disciplinaires semblent confirmer qu’il reste beaucoup à faire pour fournir aux professeurs de FLE un cadre professionnel propice à l’épanouissement personnel et à l’articulation réelle entre enseignement et recherche, et ce malgré des conditions matérielles plutôt satisfaisantes –du moins comparées à celles d’autres pays et dont nous avons pu prendre connaissance grâce au projet CECA.

En effet, sans grande surprise, les données d’enquête révèlent des conditions de travail très précaires pour les enseignants de langue, embauchés en contrat à durée déterminée, avec peu de prestations sociales et des charges horaires très importantes, aussi bien dans le public que dans le privé. Pourtant, contrairement aux idées reçues, les quatre enseignantes observées ont une formation universitaire spécialisée et suivent régulièrement des stages de formation continue, surtout dans les grandes villes. Il reste donc de nombreux défis académiques, administratifs et institutionnels à relever afin de valoriser le métier d’enseignant en général et celui d’enseignant de langue en particulier. Notre équipe de recherche souhaite, à terme, développer la réflexion autour de ces différents aspects.

2.4. L’évolution des représentations

L’interprétation des données sur les représentations et les pratiques de classe, recueillies à travers de questionnaires auxquels ont répondu enseignants et apprenants, souligne la prégnance de la figure du professeur comme détenteur du savoir et, partant, de l’apprenant comme récepteur des connaissances. Pourtant, une analyse plus fine permet déjà de repérer des fissures dans ce modèle, et il conviendrait donc de compléter et de nuancer les résultats. Les pratiques de classe observées, très diversifiées, démentent elle aussi cette image conventionnelle.

Les premiers résultats relatifs aux représentations pointent également la place centrale qu’occupe l’affectivité dans la perception de l’enseignement et de l’apprentissage. Cette piste de recherche, mise en relation avec une culture nationale, gagnerait sans doute à être explorée davantage. Stéphanie Voisin et Vincent Summo proposent plus loin une première approximation à cette problématique.

2.5. Le rôle des manuels

Les questionnaires appliqués et les observations réalisées permettent de commencer à problématiser le rôle des manuels. En effet, nous avons été étonnés du peu de place accordé aux manuels pendant les cours, malgré les discours recueillis à leur sujet, qui ne semblent pas correspondre aux pratiques observées. Cela peut tenir à la période d’observation (mai 2007), proche de la fin d’année scolaire et consacrée donc aux révisions. Nous devrons réaliser une étude plus poussée afin de déterminer si la relative désaffection par rapport aux manuels était un fait ponctuel ou reflète au contraire une tendance généralisée.

3. Perspectives

Il conviendra sans doute de mettre en contraste ces premiers résultats avec d’autres réalités socioculturelles à travers le monde. Cette étape, amorcée lors du XII congrès international de la FIPF (juillet 2008), ne fait que commencer. Nous attendons en ce moment le retour de notre synthèse avec les commentaires de l’équipe tunisienne, et nous recevrons sans doute bientôt la réaction de l’équipe vietnamienne face à notre lecture critique de leur synthèse. Le début de cet échange international a mis en évidence de fortes divergences non seulement entre les cultures d’enseignement et les cultures d’apprentissage de chacun des pays concernés, mais aussi entre cultures de recherche, qui pourraient ultérieurement faire l’objet d’une riche réflexion.

Notre équipe a d’ores et déjà participé à plusieurs colloques et congrès nationaux et internationaux ; nous continuerons à y présenter au fur et à mesure les avancées obtenues. Les études interprétatives finales pourraient donner lieu à une ou plusieurs publications, tandis que les pistes de travail ouvertes et mentionnées plus haut devraient aussi mener dans certains cas à la parution d’articles spécialisés.

Par ailleurs, une meilleure connaissance du contexte local devrait permettre de songer bientôt à des réalisations diverses visant à accorder les propositions méthodologiques aux pratiques d’enseignement existantes dans les établissements mexicains, en fonction des cultures d’enseignement et d’apprentissage mises en évidence. Nous comptons obtenir à nouveau dans cette tâche le soutien de l’AMIFRAM. D’ores et déjà, notre participation à ce projet nous a permis de renforcer les liens de coopération interuniversitaire, singulièrement importants dans un contexte de consolidation du réseau national des licences de français et de développement de la mobilité. À partir de cette expérience, les membres de l’équipe ont mis en route d’autres projets de collaboration dans le domaine du FLE, ce qui laisse entrevoir la consolidation d’un réseau de recherche national et l’émergence d’un réseau international.

Bref, à travers le projet CECA nous espérons contribuer à favoriser la coopération et la solidarité interinstitutionnelle ; à enrichir l’enseignement supérieur et la recherche ; à valoriser le rôle des associations ; et à participer plus activement au développement de la didactique du français langue étrangère.


Le projet CECA Mexique: répertoire langagier des lycéens mexicains

Béatrice Blin

 

Dans cette partie de notre dossier, nous allons nous intéresser au répertoire langagier des lycéens de notre enquête. Tout au long de cet article, nous entendrons par répertoire langagier : l’ensemble des langues que les lycéens utilisent « au gré des situations de communication auxquelles ils sont confrontés » (Cuq, 2003).

Il nous semble primordial, dans un pays multilingue [6] comme le Mexique, de s’interroger sur le répertoire langagier des lycéens afin de savoir quels types de locuteurs plurilingues sont les lycéens mexicains d’aujourd’hui. En effet, alors que les réflexions sur le plurilinguisme sont très présentes dans le domaine de la didactique des langues, il n’existe pas à notre connaissance d’enquête récente qui fasse le portrait du répertoire langagier des lycéens qui étudient le français dans notre pays. De surcroît, le développement de la société mexicaine crée continuellement de nouvelles situations de contact des langues, car « les progrès technologiques (accès au chaînes de télévision par antenne parabolique, au réseau Internet, etc.), les mouvements touristiques (certaines régions côtières envahies de façon saisonnière par des visiteurs d’autres langues et cultures), les conséquences de la mondialisation et de l’internationalisation » (Cambra, 2003 : 35) font que les rencontres avec les langues étrangères (discours et/ou locuteurs) sont de plus en plus nombreuses.

Pour traiter notre question, nous utiliserons les données que nous avons recueillies lors de notre enquête de terrain [7] . Nous pourrons ainsi, d’une part, lister les langues qu’utilisent plus ou moins quotidiennement les lycéens et, d’autre part, savoir dans quels domaines et pour quels types d’activité ils les utilisent ou disent les utiliser. Nous allons voir que la recherche que nous avons menée nous permet de faire, d’une part, une première reconnaissance de l’univers langagier des lycéens et, d’autre part, d’établir un recueil de représentations des langues en présence. En effet, même si le questionnaire [8] que nous avons appliqué pour constituer notre corpus n’a pas été conçu comme un recueil de représentations, il nous fournit néanmoins quelques informations allant dans ce sens. Toutefois, nous souhaitons préciser que bien que nous ayons effectué notre enquête dans des villes et des lycées représentatifs du pays, la taille de notre corpus et la visée ethnographique de la recherche ne nous permettent pas de généraliser nos résultats.

1. Les répertoires langagiers des lycéens de l’enquête

Nous allons présenter l’univers langagier des lycéens [9] . Il s’agira d’observer, d’une part, quelles langues sont utilisées dans le domaine privé –pour communiquer avec les membres de la famille –et, d’autre part, quelles langues sont pratiquées par les apprenants dans le cadre de leurs loisirs : la télévision et Internet.

1.1 Les langues utilisées pour communiquer avec les membres de la famille

Tous les lycéens interrogés ont déclaré utiliser l’espagnol pour communiquer avec les membres de leur famille. L’espagnol a été la seule langue nationale citée. Nous pouvons interpréter cette réponse de trois manières différentes. Premièrement, l’espagnol est, en effet, la seule langue utilisée dans la famille. Deuxièmement, d’autres membres de la famille parlent d’autres langues nationales mais les lycéens ne les parlent pas donc ils n’en ont pas tenu compte. Troisièmement, les lycéens n’ont pas souhaité mentionner une ou des langues originaires parlées au sein de la famille [10] .

Par ailleurs, et de manière paradoxale, tous les groupes, excepté celui d’Atlixco, évoquent l’utilisation de l’anglais et/ou du français pour des échanges ayant lieu avec des membres de leur famille, même s’ils signalent qu’ils le font rarement. Cela signifie, d’une part, que leur famille ou des membres de leur famille parlent également français et/ou anglais et, d’autre part, que l’univers familial offre un contexte de réutilisation des compétences langagières en langues étrangères (dorénavant LE) acquises dans le contexte scolaire. Il semblerait que l’utilisation de ces deux langues ne corresponde pas à un besoin de communication mais plutôt à une envie de pratiquer la LE, de partager ses compétences langagières en LE au sein de la famille. Il faudrait s’interroger sur les points de rencontre des domaines éducationnel et personnel et sur les prolongements possibles de l’utilisation des LE dans le milieu familial. Il serait également bon, en tant qu’enseignant(e), de s’interroger sur la manière d’inclure les membres de la famille dans la réalisation de certains devoirs ou projets.

1.2 Les langues des loisirs et des nouvelles technologies

La télévision

Les apprenants ont tous déclaré regarder des programmes de télévision en LE. Sept langues ont été citées par les lycéens : anglais, espagnol, français, hébreu [11] ,  italien, japonais et portugais. En général, chacun d’eux a énuméré deux ou trois langues. Les combinaisons de langues sont très variées, cela est particulièrement vrai pour la ville de Mexico. Même si nous savons que beaucoup d’émissions de télévision sont sous-titrées, nous pouvons constater que le répertoire langagier des lycéens, dans le cadre de la réception audiovisuelle, ne se limite pas à celui des langues étudiées dans le système scolaire.

Internet

Comme nous l’avons mentionné dans l’introduction de cet article, les progrès technologiques et notamment le développement du réseau Internet créent de nouvelles occasions de contact avec les LE et avec leurs locuteurs. Au Mexique, 1995 est considérée comme l’année du décollage du réseau Internet dans le pays et, depuis cette date, le nombre d’abonnés n’a cessé de croître. En 2004, le pays comptait quatorze millions d’abonnés alors qu’ils n’étaient que cinq millions en 2000. Il est bien sûr important d’avoir à l’esprit que dans un pays émergent tel que le nôtre, le nombre d’abonnés est réparti de façon non homogène entre villes et campagnes et entre population aisée et marginalisée. Par ailleurs, il faut souligner qu’une enquête effectuée en 2004 par la Asociación Mexicana de Internet (AMIPCI) révèle que  47% des utilisateurs ont entre 13 et 24 ans. Nous pouvons donc supposer que les lycéens de notre étude font partie de ces jeunes navigateurs [12] .

Les réponses au questionnaire montrent que la rencontre avec la LE est moins variée et, toutes proportions gardées, moins fréquente lorsque les apprenants sont connectés à Internet que lorsqu’ils sont face au petit écran [13] . Trois langues ont été citées par les lycéens : l’anglais, l’espagnol et le français. La révolution technologique que représente le réseau Internet et qui permet, d’une part, d’avoir accès à un grand nombre de texte en LE et, d’autre part, de faciliter les rencontres avec l’étranger –dans le sens de celui qui appartient à une communauté géographique autre que la mienne – ne provoque pas ou peu, chez les jeunes de notre enquête, la rencontre avec la LE. Cette dernière semble plus fréquente devant le petit écran. Enfin, notons également que cette fois, les langues utilisées pour naviguer sur Internet sont celles que les apprenants étudient au lycée.

2. Regard sur l’objet langue et sur son apprentissage

2.1 Les langues en présence

Une des questions de notre enquête portait sur les langues que préfèrent les lycéens. Pour répondre à cette question, ces derniers ont cité neuf langues au total :

Les langues que les lycéens disent préférer

·  Allemand

·  Anglais

·  Espagnol

·  Français

·  Hébreu

·  Italien

·  Japonais

·  Portugais

·  Russe

Autres réponses :

·  Toutes les langues romanes

·  Toutes les langues

·  Aucune

Nous pouvons noter, une fois de plus, que la seule langue nationale mentionnée est l’espagnol. Les lycéens ont cité en moyenne entre une et quatre langues. Parmi les neuf langues, les trois premières langues préférées par les apprenants ont toujours été les mêmes : l’anglais, le français et l’espagnol. Cependant, il nous semble important de souligner que nous avons obtenu des résultats différents suivant les villes.

À Atlixco, la langue la plus citée est l’anglais suivie du français, l’espagnol arrive loin derrière à la même place que l’italien. À Guadalajara et à Xalapa, la langue la plus citée est l’anglais, elle est suivie de loin par le français qui arrive à la même place que l’espagnol. Ainsi à Atlixco, Guadalajara et Xalapa, l’anglais est la langue préférée des apprenants. À Mexico, la langue la plus citée est le français, suivie de près par l’anglais, l’espagnol arrive loin derrière. Dans le classement effectué par les apprenants, l’espagnol est toujours arrivé en dernier. Toutefois, nous pouvons envisager que certains lycéens n’ont pris en compte que les LE pour répondre à cette question, ils ont donc omis l’espagnol.

2.2 Le français comme objet d’apprentissage

Nous allons maintenant nous intéresser à la relation d’apprentissage. De nombreuses enquêtes sur les représentations du français au Mexique montrent que le français est souvent considéré comme la langue de l’amour et la France comme un pays « romantique et terre d’amour » (Pugibet, 1983 : 48).

Cependant, nous allons voir que les résultats de notre travail montrent que ces représentations, même si elles existent toujours, en côtoient de nouvelles. Pour cela, nous allons observer les discours des lycéens quand ils expliquent pourquoi ils aiment le français. Pour réaliser cette analyse, nous avons classé les dires des lycéens en fonction de trois types de considérations que nous nommons : considérations esthétiques, considérations pratiques et considérations utilitaires.

Les considérations esthétiques : l’amour de la langue

·  La phonétique est très belle.

·  Elle sonne bien.

·  Elle est agréable à écouter.

·  C’est une bonne langue.

·  Le français m’attire.

·  Elle me plaît.

Ce premier type de considérations nous ramène à des normes subjectives [14] . Les discours des apprenants laissent apparaître une représentation hiérarchique des langues sur le plan esthétique. Il serait bon de se demander comment la phonétique d’une langue pourrait-elle être belle ou laide ? Et de la même manière, demandons-nous, non sans jeu de mots, comment pourrait-il exister de mauvaises langues ?

            Le second type de considérations correspond à celles de type pratique.

Les considérations pratiques

·  Elle est facile.

·  Elle n’est pas très compliquée.

·  Sa grammaire ressemble à l’espagnol.

·  C’est plus facile et mieux que l’anglais.

            Les lycéens disent aimer le français car ils considèrent que c’est une langue        « facile » voire « plus facile » que l’anglais. Ils aiment cette langue car ils rencontrent peu de difficultés lors de son apprentissage. Nous pouvons observer que les lycéens comparent les langues entre elles. Ils établissent de nouveau une hiérarchisation.

Les dernières considérations que nous évoquerons sont celles de type utilitaire.

Les considérations utilitaires

·  Elle est utile pour ma vie.

·  Elle m’aidera dans ma carrière professionnelle.

·  L’anglais et le français sont indispensables.

            Ces dernières considérations montrent que la langue française n’est plus uniquement considérée comme la « langue de l’amour ». Elle est également une              langue de travail. Il faut souligner que le français apparaît, aux côtés de l’anglais, comme une des langues qui peut permettre la réussite professionnelle.

Comme nous l’avons déjà signalé, le projet CECA, par sa visée ethnographique, ne nous autorise pas à dresser un portrait des répertoires langagiers des lycéens mexicains qui étudient le français. En revanche, l’étude que nous avons menée et les résultats que nous avons obtenus, nous permettent d’envisager de nombreuses pistes de recherche sur le plan national. Ainsi, en guise de conclusion et au vu des résultats présentés, nous proposons quelques pistes de réflexion qui pourraient nous aider à revoir les contenus des programmes proposés dans nos institutions éducatives afin de mieux préparer les lycéens mexicains aux enjeux de la mondialisation.

Quelle place le français peut-il ou doit-il occuper dans le cadre d’une éducation au plurilinguisme [15] en contexte scolaire au Mexique ? Comment, en tant qu’enseignant(e), présenter le français comme une langue moderne, une langue qui évolue afin d’infléchir les représentations existantes ? Quel type de support faut-il utiliser dans le cadre d’une formation en langues dans notre contexte géographique et social ? Quelles formations professionnelles proposer aux enseignants de FLE au Mexique afin que celles-ci prennent en compte nos réalités nationales ?

Bibliographie

 
BERTHIER, Nicole
2004 Les techniques d’enquête. Paris. Armand Colin.
 
CAMBRA, Margarida
2003 Une approche ethnographique de la classe de langue, Paris. Didier.
 
CONSEIL DE L’EUROPE.
2001 Cadre européen commun de référence pour les langues, Paris. Didier.
 
CUQ, Jean-Pierre (dir.)
2003 Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et seconde, Paris.     CLE International.
 
HOUDEBINE-GRAVAUD, Anne-Marie (dir.)
2002 L’imaginaire linguistique, Paris: L’Harmattan.
 
MOORE, Danièle (dir.)
2001 Les représentations des langues et de leur apprentissage, Paris. Didier.
 
PUGIBET, Véronica
1983 « Des stéréotypes de la France et des Français chez des étudiants mexicains ». Le Français dans le Monde, novembre-décembre, 45-53, Paris. Hachette/Larousse.

 


Le projet CECA Mexique : les représentations des rôles de l’enseignant et de l’élève

Stéphanie Voisin

Vincent Summo

 

Notre contribution à la recherche du groupe CECA Mexique consistait en l’analyse des représentations concernant les rôles de l’enseignant et de l’élève au sein de l’enseignement secondaire.

Pour ce faire, un  questionnaire a été appliqué à 54 lycéens des groupes filmés, répartis de la manière suivante : 20 à Mexico, 18 à Atlixco, 9 à Guadalajara et 7 à Xalapa.  La consigne était ainsi établie dans le protocole de recherche :

« Ecrivez les 5 mots ou expressions qui vous viennent à l’esprit lorsque je vous dis :

- enseignant    -  élève                        - apprendre le français            -enseigner le français »

Chaque équipe locale s’est chargée d’appliquer les questionnaires et de proposer une synthèse des réponses sous forme de tableaux accompagnés de commentaires. L’équipe de Puebla, à partir de ces données, a organisé et classé ces informations en différentes rubriques : l’enseignant (son action), l’univers affectif (attitudes et valeurs), le contexte, l’apprenant (son action). La méthodologie d’analyse des informations recueillies fut le fruit d’un consensus au sein du groupe CECA Mexique.

L’analyse des données collectées nous a permis d’ouvrir certaines pistes d’interprétation des représentations des lycéens et de leurs professeurs interrogés quant aux rôles de l’enseignant et de l’apprenant dans le processus d’enseignement/apprentissage du français langue étrangère. Il convient de préciser que nos interprétations issues de notre appartenance culturelle, de notre vécu ainsi que de nos expériences professionnelles sont, bien sûr, teintées de nos propres représentations et ne sont donc qu’un point de vue parmi d’autres tout aussi acceptables.

1. L’enseignant au centre du processus d’enseignement/apprentissage

Contrairement aux postulats communicatifs dont se réclament les institutions des groupes étudiés, il ressort des questionnaires que l’enseignant domine le jeu éducatif. Il est maître de l’espace classe et du temps du cours. Il est celui qui possède un savoir et une expérience qu’il décide de partager avec les élèves (il est caractérisé dans les réponses au questionnaire comme un « guide » « formé » qui a pour rôle de « partager » ses « connaissances »). Il se considère donc comme facilitateur d’apprentissage et transmetteur de connaissances.  Toutefois la possession de ce savoir ne constitue pas sa caractéristique dominante qui est envisagée sous l’angle des compétences méthodologiques (l’enseignant est vu comme une personne devant « expliquer » avec « dynamisme »). Ni sa formation ni sa pédagogie ne sont remises en cause par les élèves qui sont soumis et passifs, puisque leurs activités n’engagent en aucune façon leurs responsabilités ni leur réflexion personnelle. En effet, les tâches qu’ils accomplissent consistent à suivre les indications, c’est-à-dire à faire les devoirs qui leur sont imposés par le professeur (comme « écrire », « parler », faire les « devoirs »). Les activités centrées sur l’enseignant lui-même mettent bien en évidence sa situation de pivot de la relation éducative, et celles qui sont centrées sur l’apprenant restent à l’initiative du professeur et sous son contrôle (l’enseignant est l’ « autorité »). Si interaction il y a bien entre enseignant et apprenants, c’est dans l’aide, la patience et les encouragements que les élèves attendent qu’il leur prodigue, mais il n’y a pas de dialogue réel. Bien entendu, ces attitudes de l’enseignant et des apprenants sont des manifestations de leurs représentations, dans ce que celles-ci ont de plus culturel, et leur diffusion s’opère grâce à l’école. Autrement dit, une sorte de conditionnement culturel prépare les apprenants à la séparation des rôles entre enseignant symbole de l’autorité et apprenants récepteurs des connaissances de l’enseignant.

2. Les représentations vis-à-vis des rôles des acteurs du processus : un conditionnement social

L’école est l’un des vecteurs de transmission des représentations mais il n’est pas, chronologiquement, le premier dans l’existence d’un individu. C’est initialement la famille qui va jouer un rôle clé dans la socialisation de l’enfant, qui va en outre lui inculquer les représentations de sa culture et de sa classe sociale, et,  partant, lui fournir des schémas inconscients de perception et d’action par rapport à l’environnement. En effet, la famille va de soi, c’est une communauté qui regroupe et abrite ses membres dans une vision collective rassurante du monde.

Soulignons que les représentations de notre public d’étude, public captif d’adolescents de 16-17 ans incités à l’apprentissage du français par la famille ou l’institution, sont façonnées et transmises en dernière instance par le groupe de pairs ou encore les médias.

Concernant l’enseignant, on peut supposer que la formation qu’il a reçue l’influence inconsciemment dans la conception qu’il possède de son rôle et de celui de l’apprenant, ainsi que dans sa pratique. Les réponses aux questionnaires montrent cette divergence entre la place centrale accordée à l’enseignant par les élèves (il est défini par ses « connaissances », ses « responsabilités », son « autorité ») et la démarche communicative dont il dit être le reflet (il dit « guider », « orienter » les élèves). En effet il ne considère pas dans les faits l’apprenant comme co-constructeur de l’apprentissage, mais il lui attribue la responsabilité de ses résultats (l’élève possède des « responsabilités » et il doit fournir un « travail continu » selon le professeur).

L’individu apparaît donc comme dépositaire de valeurs et de normes imposées de l’extérieur par conditionnement. Ce faisant, ses actions sont largement tributaires de son appartenance culturelle.

En somme, malgré leur motivation préalable pour l’étude de la langue et de la culture françaises, les acteurs du processus ne peuvent échapper à des idées bien établies sur celles-ci et qui vont déterminer en grande partie l’apprentissage.

Nous venons de voir l’origine des représentations sur la langue apprise ainsi que sur les rôles des acteurs du processus, et comment l’univers familier y est présent. Approfondissons à présent cet univers familier en nous attachant au poids de l’affectivité dans le processus d’enseignement/apprentissage.

3. Le rôle prépondérant de l’affectivité

Les apprenants attachent énormément d’importance à la relation avec leur enseignant, spécialement à la manière dont celui-ci les traite. S’il n’existe pas de véritable réflexion sur la méthodologie d’enseignement, l’enseignant ou le cours sont jugés (les termes axiologiques : « amusant », « intéressant », « motivant » nous le montrent). L’élève semble ne pas pouvoir trouver satisfaction par rapport au cours de français si l’enseignant ne le traite pas cordialement. Pour ce qui est des enseignants, la perception de leur relation envers les élèves est plutôt axée sur l’aspect professionnel, l’apprenant étant perçu essentiellement à travers son rôle et ses fonctions (« responsabilité », « étude »).

Par ailleurs, nous avons aussi pu constater qu’il existe chez les élèves une certaine territorialité du cours de français puisqu’ils font très souvent référence à l’espace géographique et social de la salle de classe, comme un territoire commun au seul groupe d’apprenants. On retrouve ici les mêmes caractéristiques que pour la famille : le groupe de pairs associé à l’enseignant constitue une référence stable et rassurante, d’autant plus qu’il semble très important pour les élèves d’étudier dans une ambiance chaleureuse et de bonne humeur.

Les clivages sociaux souvent très importants dans la distinction d’opinions et de points de vue ne nous semblent pas ici  opératoires, dans la mesure où ils ne déterminent ni les réponses des élèves des établissements publics ou privés ni celles de leurs enseignants. C’est bien davantage l’identité culturelle des élèves qui explique leurs réponses au questionnaire.

En guise de conclusion

L’interprétation que nous avons proposée quant aux représentations des apprenants correspond également à la vision qu’ont les quatre enseignantes interrogées de leur rôle et de celui des élèves. Elles sont inconsciemment les porte-parole de leur culture, de leur société et de leur éducation et reproduisent sans doute les schémas d’enseignement auxquels elles ont été confrontées. Si leur démarche d’enseignement/apprentissage se veut communicative, ce que semblerait démontrer le fait qu’elles placent l’apprenant au centre du processus, il n’en demeure pas moins que cette place centrale n’implique pas que l’apprenant soit réflexif, autonome et prenne l’initiative dans la construction de ses compétences. Loin de vouloir montrer du doigt cette tendance au conservatisme éducatif, nous souhaitons inviter à prendre du recul par rapport à nos pratiques de classe souvent si différentes de nos professions de foi pédagogiquement correctes. Combien d’entre nous pourtant formés aux méthodologies d’enseignement les plus modernes continuent à diriger leurs groupes et à leur inculquer des connaissances sans leur donner l’espace nécessaire à la construction  de leurs propres savoirs.

L’ensemble des réponses apportées au questionnaire reflète une certaine idée des rôles de l’enseignant et de l’apprenant, dont nous savons qu’elle est très fortement dépendante de l’appartenance culturelle des enquêtés et des représentations qui en découlent.

Rappelons que la visée de cette recherche est d’élaborer une ethnographie comparée de la classe de FLE, grâce aux enregistrements vidéo de classes qui sont à l’heure actuelle interprétés par des équipes d’autres pays afin d’établir un panorama des différentes pratiques de classe à travers le monde francophone. Alors que l’équipe mexicaine s’est vue chargée de l’analyse des vidéos du Vietnam et du Gabon, nos enregistrements sont actuellement entre les mains de l’équipe tunisienne.

Sans entrer dans le détail, dans les institutions observées au Vietnam comme au Mexique, l’enseignant est le pivot de la situation pédagogique. Il faut pourtant mentionner une différence : au Vietnam les élèves ne parlent et ne se déplacent qu’avec l’autorisation du professeur. Les chercheurs dudit pays relient cette conduite au profond respect dû au professeur, respect à tel point enraciné dans la culture qu’il a creusé un fossé entre  enseignant et apprenant empêchant aussi bien l’interaction personnelle que pédagogique. Le professeur, quant à lui, attend de ses élèves discipline et obéissance.

C’est sur cette différence culturelle notable que nous concluons cet article.


Le projet CECA Mexique : l’alternance des codes dans la classe de langue

Anne-Catherine Didier

 « No quiero poulet! » protestait Diego, petit garcon franco-mexicain de quatre ans vivant à Guadalajara, à sa maman française. S’agissait-il de « fragnol » ou d’« españais » ? Il est évident que Diego, en plein développement bilingüe, utilisait une syntaxe espagnole en y insertant un mot en français sans être conscient du changement de code qu’il effectuait. Il s’agit ici d’un apprentissage naturel, mais ce phénomène existe également dans les classes de langue en cas d’apprentissage formel.

Pendant longtemps l’alternance des codes ou alternance codique en classe de langue était considérée comme négative et même nuisible. Cette notion est aujourd’hui réhabilitée au point d’être contemplée comme une véritable stratégie d’enseignement/apprentissage et de jouer un rôle dans la construction des savoirs en langue étrangère.

Afin d’analyser ce phénomène nous définirons dans un premier temps le terme d’alternance codique, nous réviserons dans un deuxième temps certaines propositions théoriques et enfin nous illustrerons comment ce phénomène se produit dans des cours de FLE que nous avons filmés dans quatre établissements mexicains dans le cadre du projet de recherche « Cultures d’Enseignement, Cultures d’Apprentissage » (CECA) entre 2007 et 2008.

Cette réflexion nous permettra d’un côté de comprendre quand, comment et pourquoi l’apprenant et le professeur de langue étrangère utilisent l’une ou l’autre langue et d’un autre côté de repérer et d’analyser les marqueurs significatifs et traits discursifs les plus remarquables d’alternance langagière dans une classe de FLE qu’ils soient conçus de façon inconsciente ou qu’ils représentent des démarches conscientes.

1. Définitions

L’étude de l’emploi de l’alternance codique en classe de langue se développe surtout à partir des années 1990. « Travaux qui ont contribué de manière essentielle à sa réhabilitation », nous rappelle Maria Causa (2007). Mais avant d’étudier ce phénomène nous en présentons quelques définitions.

Si pour Heller et Pfaff (1996) « l’alternance codique est un phénomène de contact qui peut se produire lorsqu’un individu tente d’employer plusieurs langues dans une même conversation », Sabine Ehrart (2002) en élargit la définition en considérant « le code-switching comme la rupture de langue au moment où la parole passe à l’autre (turn-taking) ». Elle propose d’ailleurs d’employer le terme code-hopping pour ce phénomène. C’est le cas par exemple lorsque, dans une famille où le français, l’espagnol et le valencien sont constament utilisés par ses différents membres le père pose une question en valencien et les enfants y répondent en français.

De façon générale l’alternance codique ou code-switching est définie dans Wikipédia     (2008), comme « une alternance de deux ou plusieurs codes (langues, dialectes ou registres linguistiques). L’alternance peut avoir lieu à divers endroits d’un discours, parfois même au milieu d’une phrase, et le plus souvent là ou les syntaxes des deux codes s’alignent. Les raisons de cette alternance sont multiples. »

Cette alternance de code ne traduit donc pas uniquement un manque de maitrise dans l’une des deux langues concernées, mais peut refléter également une véritable compétence bilingue où les interlocuteurs jouent avec les codes pour différentes raisons.

 

2. Quelques notions théoriques

2.1. Les types d’alternances

Selon Lüdi et Py (2003, p.146) il existe « une véritable grammaire du code-switching » qui permet de situer les alternances dans la conversation selon qu’elles ont lieu entre ou à l’intérieur d’un tour de parole, d’une phrase, d’une proposition ou d’un syntagme.

Thiam (1997) les regroupe en trois types : l’alternance intraphrastique lorsque les structures syntaxiques appartenant à deux langues coexistent à l’intérieur d’une même phrase ; 

interphrastique ou phrastique

au niveau d’unités plus longues, de phrases ou de fragments de discours, dans les productions d’un même locuteur ou dans les prises de parole entre interlocuteurs ; et

extraphrastique dans des segments alternés, dans des expressions idiomatiques ou des proverbes par exemple.

Le modèle insertionnel de Myers-Scotton illustre l’alternance intra-énoncé où le locuteur utilise/emprunte le cadre syntaxique de la langue matrice dans lequel il insère des éléments de la langue encastrée. C’est le cas du petit Diego que nous avons mentionné dans l’introduction.

2.2. Les cinq motivations de l’alternance codique en classe de langue

Ehrhart (2003) propose cinq stratégies essentielles de l’alternance codique en classe de langue:

- Une stratégie pédagogique : 

Lors d’une explication, pour organiser un cours ou pour être plus proche des élèves.

 

- Une stratégie d’apprentissage :

Lorsque les élèves veulent s’exprimer et n’en ont pas les moyens linguistiques ou dans des situations à forte implication et affectivité.

- Une stratégie discursive :

Dans ce cas il ne s’agit plus d’un manque de maîtrise des deux codes, mais d’une « compétence polylectale, […] qui influe sur les relations interpersonnelles » (Thiam, 1997, p.35).

- Un caractère ludique :

Lorsque les interlocuteurs s’amusent avec les différents codes et font appel à leur créativité ainsi que pour renforcer le sentiment de complicité.

- Une relation de confiance :

Souvent une relation de confiance est nécessaire entre les locuteurs pour qu’il y ait alternance codique.

2.3 L’alternance codique comme activité réflexive (gestion du bilinguisme)

Afin de mieux comprendre ce phénomène d’utilisation des langues il nous a paru intéressant de réfléchir sur plusieurs points. Par qui, quand et pourquoi est utilisée la langue cible exclusivement, la langue source exclusivement ou une alternance entre les deux langues? Dans quelles situations d’énonciation particulières on utilise l’une ou l’autre de ces langues ou les deux à la fois? Quel rôle joue chaque langue ?

Quelle langue est utilisée lorsque l’enseignante organise le travail en classe, lorsque les élèves participent en cours, lorsque l’enseignante donne les consignes d’exercices, lorsque les élèves demandent des explications à l’enseignante, lorsque l’enseignante sanctionne les élèves ou lorsque les élèves communiquent entre eux ?

Nous présentons à continuation les résultats des recherches réalisées dans le cadre du projet CECA.

3. L’utilisation des langues : l’exemple mexicain dans le cadre du projet ceca [16]

Dans le cadre de ce projet CECA nous avons pu observer que la langue la plus utilisée dans la salle de classe FLE est le français. Il semblerait qu’il existe un contrat didactique implicite ou explicite respecté entre les apprenants et les enseignantes afin d’utiliser le plus possible la langue cible en classe. Cependant l’usage de la langue source reste très présent ainsi que des échanges où les deux langues sont mélangées. Nous allons donc analyser de façon plus précise l’utilisation des deux langues par les différents acteurs.

3.1 Langues utilisées par les apprenants

Les apprenants utilisent davantage le français lorsqu’ils s’adressent à leur professeure alors qu’ils préfèrent l’espagnol entre eux ou dans des activités à forte implication.

Les étudiants utilisent davantage leur langue source, l’espagnol, en réseau de parole horizontal, lors d’interactions élèves-élèves dans différentes situations.

Premièrement lorsqu’ils parlent entre eux de thèmes personnels qui n’ont rien à voir avec le cours (de leurs gadgets électroniques comme le Nintendo par exemple, de conversations personnelles ou du jeu de cartes qu’ils ont apporté en classe) : « JOR : ya dame las cartas no son tuyas [bon donne-moi les cartes, elles sont pas à toi]  EDW : noooooooo claro que son mías [non, mais bien sûr qu’elles sont à moi] JOR: yo te las presto [je te les prête]. »

Mais également lorsqu’ils parlent entre eux lors d’une activité de groupe (rédiger à deux ou trois une histoire au passé, par exemple). Il est très facile que la communication glisse vers leur langue première lorsque les élèves doivent se mettre d’accord, se demander mutuellement des explications et s’organiser « JOR : tu no estás haciendo nada [Tu ne fais rien] CES :  Sí /  está preguntando. [Si, il est en train de demander] » ; « JOR ¿Cómo me dijiste? [Comment tu m’as dit?] KAR: ¿De qué lo vamos a hacer? [Sur quoi on va le faire?] ». On pourrait parler ici de gestion de la tâche.

Ils utilisent leur langue première également lorsqu’ils s’impliquent plus personnellement dans les activités. « L’implication que nous prenons dans son sens didactique se définit donc comme le phénomène qui se produit quand le sujet penche vers le pôle de la personne » (Dabène, 1990). Pour réagir face aux autres élèves avec des expressions telles que « no manches » [arrête, ça suffit], « orale » [super], « chale » [dis donc], « ya » [ça y est], « a ver » [fais voir], « güey » [mon vieux], « tonta » [bébête], « ñoña » [l’intellectuelle de la classe], « esa es trampa » [c’est de la triche] etc… ou « a ver, a ver » [fais voir, fais voir] lorsqu’ils montrent leur intérêt pour l’activité en cours. L’implication est présente également lorsqu’ils utilisent des marqueurs centrés sur l’énonciation tels que des marques d’auto-référence (idem) : « yo, yo, yo » (moi, moi, moi) lorsqu’ils désirent passer au tableau ou répondre à la question du professeur, c’est une véritable lutte pour le pouvoir verbal. Dans le double niveau d’énonciation on peut dire qu’ils utilisent dans de tels cas le je personne et non plus le je apprenant (idem). Ce phénomène d’implication est très marqué dans certaines séances que nous avons observées et lors de certaines activités proposées par les professeures. C’est le cas par exemple de l’activité où les élèves jouent au « pendu » car il s’agit d’une compétition entre deux équipes. C’est d’ailleurs la séance où le pourcentage d’espagnol est le plus élevé car l’implication et très forte et la situation a une forte composante communicative et forte affectivité. L’emploi de la langue première réapparaît lors de « l’évaluation » des résultats par les autres élèves « malo, malo » (faux), « está bien fácil » (c’est super facile), « ¿eso eran quinientos ? » (ça, c’était 500 points ?), « menos quinientos » (moins 500), « no, para mí, yo gané » (non, pour moi, c’est moi qui ai gagné) où on retrouve le phénomène d’implication.

Les élèves utilisent aussi leur langue source bien sûr lorsqu’ils ne connaîssent pas le mot en français. Louga-Hamid explique qu’il s’agit de négociation du sens (idem), par exemple lorqu’ils utilisent en espagnol « quince » (quinze) ou « cangrejo » (crâbe) ou lorsqu’ils demandent au professeur de leur traduire certains mots, « LIN : ¿Cómo dices donde duermen los animales? (Comment tu dis là où dorment les animaux ?) ».

Par contre les apprenants utilisent la langue cible, le français, dans des interactions beaucoup plus pédagogiques, lors d’interactions verticales, professeure-élève. Dans les activités où les échanges sont beaucoup plus contrôlés il est plus facile pour les professeures de favoriser l’usage de la langue étrangère. Lorsque les apprenants répondent aux questions de leur professeure, lorsqu’ils réalisent les activités proposées, lorsqu’ils posent des questions à leur professeure sur ce qu’ils sont en train de faire. C’est le cas par exemple lorsqu’une activité est basée sur des questions-réponses entre le professeur et les élèves. La majeure partie des interactions en langue étrangère se fait entre l’enseignante et les élèves comme dans la consigne d’une professeure « cite quatre aliments que tu aimes » à laquelle l’élève doit donner la réponse correcte en français  pour gagner des points. 

3.2 Langue utilisée par les enseignantes

De façon générale les enseignantes utilisent prioritairement le français. Elles font appel à des stratégies diverses telles que le changement de débit, la répétition, la mimique, etc. pour faire passer le message en français et pour que les apprenants comprennent. Il semblerait que les enseignantes soient convaincues des bienfaits de la méthode directe et que l’utilisation de la langue source soit vue comme négative. L’usage de la langue étrangère, le français, se fait principalement lors de séquences organisationnelles (composées d’interventions qui règlent l’organisation de l’interaction didactique et du cours en général), conversationnelles ou métalinguistiques (où les interactants parlent de la langue). Elles remplissent leur rôle de détenteur et transmetteur du savoir, de canal par lequel passe la langue cible. Elles posent des questions (« Quelle est la règle du futur simple ? »), elles donnent des consignes et des indications (« Mets cette phrase à la forme négative »), elles expliquent («Je ne peux pas dire j’ai retourné parce que retourner ne se conjugue pas avec avoir, on va le conjuguer avec être »), etc. Leur discours est très didactique, elles jouent leur rôle de professeure et utilisent le je enseignant. Elles répondent à certaines conventions communicatives, à un rituel communicatif. Elles sont en général directrices des échanges (« OK on y va »). Leurs obligations/droits, comme nous rappelle F. Cicurel (idem), sont de faire produire (« On te propose d’aller voir un film de science fiction, tu refuses »), de faire comprendre et d’arbitrer en jugeant les performances des élèves («OK, très bien »). Ce discours est produit dans la langue cible et est utilisée essentiellement en tant que stratégie pédagogique.

Ce qui est intéressant c’est d’analyser les raisons pour lesquelles elles utilisent leur langue première, l’espagnol. Il est clair que l’usage de l’espagnol, que les enseignantes souhaiteraient éviter autant que possible, apparaît lorsqu’il est perçu comme le plus sûr moyen de s’assurer de la compréhension de la consigne et d’arriver à ce que l’élève fasse ce qui est attendu de lui. C’est donc une sorte de raccourci méthodologique pour gagner du temps ou encore lorqu’elles ou les élèves montrent des signes de fatigue.

Mais de façon générale elles utilisent leur langue source quand elles réprimandent les élèves (« ¡Ya, afuera ! » [bon, dehors !]), qu’elles font des reproches (« ¡Muchachos ! ¿Qué pasó ? » [Les gars, qu’est-ce qui se passe ?], « Tranquilas » [du calme]), qu’elles donnent un ordre à propos de l’attitude des élèves (« Dámelo » [donne-le moi]) ou qu’elles les menacent (« ¿Te quieres salir ? » [tu veux sortir ?]) ou encore lorsqu’elles plaisantent (« ¿A poco están borrachos todo el tiempo ? ¡Sííí ! Por eso duermen » [ne me dites pas qu’ils sont saouls tout le temps. Siii ! C’est pour ça qu’ils dorment]). Elles ont donc recours à l’espagnol, la langue maternelle des élèves mais également la leur, quand il s’agit de discipline et qu’elles essaient de garder le contrôle de la classe. Ici aussi, on peut parler d’implication lorsqu’elles perdent patience. Dans ces cas elles adoptent le je personne plus que le je enseignante pour véhiculer des relations interpersonnelles et tisser des liens affectifs. 

De temps en temps cependant elles alternent les deux langues afin d’être sûres d’avoir été comprises par les apprenants, lors de séquences métalinguistiques par exemple, de traductions ou de tics de langage « Par la bande dessinée…¿Sí? … et qu’est-ce que vous avez trouvé ? ».

En résumé, les échanges verticaux professeures-élèves ou élèves-professeures sont réalisés en majorité en langue cible alors que les échanges horizontaux élèves- élèves se produisent davantage en langue source tout comme les interactions qui véhiculent une forte charge émotive.

Conclusion

Langue cible, langue source (et parfois même d’autres langues comme l’anglais ou l’italien), interactions élèves-élèves ou professeur-élèves, travail en groupe ou individuel, dans la classe de langue il existe de nombreux réseaux de parole complexes qui se tissent et dans lesquels on observe une alternance des langues.

 

  Au-delà de cette constatation évidente, il nous semble important que les professeurs prennent conscience de ce processus et se rendent compte des motivations, fonctions et stratégies qu’implique ce phénomène.

Quelle place joue l’alternance des codes en classe de langue dans le processus d’enseignement/apprentissage? Comment en rendre conscients les apprenants?

En tant que professeurs de FLE, plus que de proposer des réponses, nous vous invitons donc à une réflexion sur ce thème afin que l’alternance des codes soit prise en compte et ait une visée stratégique dans le processus d’enseignement/apprentissage des langues.

 

Bibliographie

 
CAMBRONE, Stella.
2004 Contact de langues en milieu scolaire. L’alternance codique en situation de classe: quelles stratégies ?, Fort-de-France, 21 p. disponible sur http://www.mq.ird.fr/pdf/AREC-F-Cambrone.pdf
 
CAUSA, Maria
2007 « Enseignement bilingue. L’indispensable alternance codique » in FDLM, nº 351, mai-juin 2007.
 
CICUREL, Francine, Dabène, Louise, Foerster Cordula, Lauga Hamid, Marie-Claude
1990 Variations et rituels en classe de langue, Col. LAL – Crédif. Hatier, 96p.
 
COSTE, Daniel
2006 « De la classe bilingue à l’éducation plurilingue », in FDLM, n° 345, 2006
 
EHRHART, Sabine
2002 « L’alternance codique dans le cours de langue : le rôle de l’enseignant dans l’interaction avec l’élève -Synthèse à partir d’énoncés recueillis dans les écoles primaires de la Sarre. » in : Anxo M. Lorenzo Suarez, Fernando Ramallo & Xóan Paulo Rodriguez-Yanez (Eds) : Proceedings / Actas. Second International Symposium on Bilingualism / Segundo Simposio Internacional sobre o Bilingüismo. Universidade de Vigo (Galicia, Spain), Vigo, Servicio de Publicacions da Universidade de Vigo, CD-Rom, October 23-26, 2002.
 
HELLER, Monica & Pfaff, Carol
1996 « Code-switching », in Handbuch Kontaktlinguistik, Walter de Gruyter Berlin, New York, 594-609.
 
LÜDI, Georges et Py, Bernard
2003 Etre bilingue, New York, Peter Lang Pub Inc, 203 p.
 
LÜDI, Georges
1994 « Dénomination médiate et bricolage lexical en situation exolingue », in AILE, n° 3, 1994, pp.115-146
 
THIAM, Ndiassé
1997 « Alternance codique », in Sociolinguistique. Concepts de base, Belgique, Mardaga pp.32-35
 
WIKIPEDIA
  http://fr.wikipedia.org/wiki/Alternance_de_code_linguistique, consulté le 19 septembre 2008.

 



[1] L’Argentine (sous la direction d’A. Sibaldi), le Brésil (H. de Albuquerque), la Bulgarie (J. Gueorgui), le Burkina Faso (Y. Ouedraogo), le Burundi (M. Mazunya), le Canada (D. Moore), l’Espagne (J. Suso), la France (F. Davin), le Gabon (J.-A. Pambou), l’Indonésie (M. Sudarwoto), le Kazakhstan (C. Faizova), le Liban (W. Berry), le Maroc (L. Messaoudi), le Mexique (H. Silva), l’Ouganda (T. Ogavu), la Roumanie (S. M. Ardeleanu), la Russie (O. Goliandina), la Tunisie (M. Ennaifar), l’Ukraine (B. Dikarev) et le Vietnam (M. Nguyen Van Dung)

[2] Établissements socio-culturellement favorisés ou défavorisés ; situés dans une grande ville ou à la campagne : avec des élèves plurilingues ou monolingues. Au Mexique, les séances de cours ont été enregistrées dans quatre établissements, dont deux publics et deux privés : Escuela Simón Bolívar à Atlixco (Puebla), Universidad del Valle de México campus Guadalajara norte dans le Jalisco, Escuela Nacional Preparatoria plantel 7 à Mexico (D.F.) et Colegio Hispano Anglo Francés à Xalapa (Veracruz).

[3] Haydée Silva, responsable du projet (Universidad Nacional Autónoma de México) ; Vincent Summo et Stéphanie Voisin (Benemérita Universidad Autónoma de Puebla) ; Béatrice Blin (UNAM et Institut Français d’Amérique Latine) ; Anne-Catherine Didier et Salomé Gómez (Universidad de Guadalajara) ; Mónica Alarcón, Magdalena Hernández et Ángel Landa (Universidad Veracruzana), avec le soutien d’Aylin Ramos, étudiante en service social (UNAM) ainsi que l’aide ponctuelle de Rosa María Durán (UNAM) et Françoise Chambeu (Ambassade de France), que nous remercions vivement. Au terme initialement prévu (juillet 2008), M. Alarcón et M. Hernández ont dû honorer d’autres engagements et ont donc quitté l’équipe.

[4] Nous avons reçu le soutien décisif de l’Ambassade de France grâce à Patrick Dahlet, que nous remercions vivement.

[5] La responsable de l’équipe mexicaine a ainsi été invitée à animer en juin 2006 un séminaire de recherche à São Paulo, afin de soutenir l’équipe CECA Brésil dans la réalisation de leur propre synthèse.

[6] Nous souhaitons rappeler qu’il est important de différencier le multilinguisme du plurilinguisme. Le premier terme se réfère aux langues parlées sur un territoire, le second aux langues parlées par un individu.

[7] La présentation du projet CECA est développée dans ce même dossier par Haydée Silva.

[8] Nous n’avons pas ici l’espace nécessaire pour présenter la démarche méthodologique que nous avons suivie. Nous signalerons juste que nous avons appliqué les questionnaires dans les 4 groupes observés (Atlixco, Guadalajara, Mexico et Xalapa).

[9] Les lycéens de l’enquête ont tous étudié l’anglais en première langue étrangère. Le français est la seconde langue étrangère étudiée.

[10] En effet, nous ne pouvons pas ignorer les statuts différents que possèdent l’espagnol (langue dominante) et les autres langues nationales (langues dominées).

[11] L’hébreu a été cité par un seul apprenant.

[12] http://www.enterate.unam.mx/Articulos/2005/abril/internet.htm, consulté le 13/09/08.

[13] En effet, nous émettons une réserve car nous ignorons le temps passé par les lycéens devant la télévision et sur Internet.

[14] Nous employons l’expression normes subjectives pour nous référer au regard porté par un interlocuteur sur sa/la langue, la « sienne » ou celle de l’autre. Il peut se manifester verbalement avec l’utilisation d’expressions stéréotypées. Un locuteur va, par exemple, considérer telle langue comme belle. (Houdebine-Gravaud, 2002).

[15] À ce sujet, voir : http://www.adeb.asso.fr/edition/brochure_Tours2007.pdf, consulté le 13/06/07.

[16] Interprétation effectuée à partir des analyses faites par les différentes sous-équipes du projet CECA Mexique.